Disclaimer : Square Enix, Disney, comme toujours.

Eh voilà, un nouveau recueil. Pour caser tous les textes que je ne peux pas rattacher à ceux que j'ai déjà lancés. Du coup, il y aura sans doute beaucoup de textes de la nuit du FOF ici, et peut-être deux ou trois autres petits bébés lancés pendant un Nano ou un défi. C'est vraiment un recueil fourre tout.

Pour ce qui est de ce premier OS, il répond à deux défis :

- La 132e nuit du FOF, avec le thème Glaciaire donné à 21h.

- Le défi No?l à rebours lancé sur l'?claireuse, avec le thème Autre sur lequel on devait écrire pour le week-end du 5 au 6 Décembre. L'OS devait faire maximum 5k mots.

Et du coup, dites bonjour au nouveau ship qu'on a trouvé avec Lae ! Le Riku/Noctis. Rien que ?a.

Pour celleux qui ne connaissent pas, Noctis est le personnage principal de FFXV. Vu que ce texte est un UA, il n'y a pas besoin de conna?tre l'univers d'où sont tirés les personnages pour comprendre, donc pas grave si vous ne connaissez pas vraiment FFXV (ou KH, pour celleux qui passeraient faire leur tour de lecture des OS de la nuit).

Bonne lecture !


Premiers flocons

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Les premiers flocons tombent sur l'herbe jaune que l'été a laissée derrière lui. Une pluie d'argent légère soufflée par le vent, qui tourne en farandole avant d'épouser la courbe irrégulière du sol. La terre froide. Les plantes mourantes. Le ciel nacré blanchit le sol, parsème de t?che les restes d'un automne mourant. Demyx a fait son travail trois mois durant. C'est fini. Il laisse la place.

Au loin, le soleil s'enfonce sous la terre. La lueur écarlate qui l'accompagne dévore l'éther, distille les couleurs chaudes dans le froid qui s'approche. Elle s'éteint peu à peu, elle-même avalée par un bleu piqué d'étoiles qui unifie le ciel. Une vo?te unie, parfaite, qui s'étend au confin de l'horizon. Se perd derrière les montagnes qui la déchirent, cachée par l'étendue infinie de la forêt.

Un grand silence. Le vent s'amuse, et personne ne l'entend.

Une main sombre s'extirpe de l'ombre d'un chêne rongé par les années. C'est d'abord un trait noir qui se répend sur l'écorce. Une bulle opaque qui gonfle, comme un morceau de gangrène. Une excroissance. Bient?t ?a s'allonge, s'étire, se divise. Des membres sortent de la chose. Des doigts. Des articulations viennent briser et tordre la ligne fluide qui s'échappe de l'arbre, alors qu'un rond noueux - une épaule ? - franchit la barrière de bois. Tous les recoins d'ombres qui le peuplent se rassemblent, fusionnent, et dessinent ensemble ce qui ressemble bient?t à une silhouette. Une silhouette humaine.

Des bras. Des jambes. Un torse lisse qui s'affine encore. Un oval imparfait, comme une tête.

La chose noire attrape les premiers flocons de la saison. Et, alors que le tas s'amoncelle au creux de sa paume, ce qui semble être sa peau prend une teinte p?le. Un voile indigo, comme une cape de seigneur, s'élance de son cou pour toucher ses cheville. Il recouvre la tenue non moins sombre qui le protège de la nudité. De noir, il ne reste alors que sa tignasse hasardeuse, et ses dix ongles courts. Presque son regard, si on ne décelait pas le reste de bleu qui roule autour de la pupille.

Noctis inspire. Il admire d'un ?il indéchiffrable son royaume étendu. Au début de la nuit, il attend.

Lentement, le paysage prend la couleur claire de la lune. Les formes lointaines se perdent sous une peau nouvelle, qui s'aplatit à chaque pas d'un passant pour porter la trace de ceux qui la foulent. Vif, l'esprit de la nuit cherche. Il traque, observe, porte son regard sur le moindre mouvement. Et puis, il sourit. Autant qu'il en est capable.

"Tu as pris ton temps, cette année."

Le vent lui répond, d'abord. Un long murmure qui fait danser la neige, un conte éternel qu'on lui chante chaque fois qu'il tend l'oreille. Il croit y deviner une voix. Un appel. Un salut. Un accueil chaleureux étouffé par le froid mordant qu'il ne sent pas. Le froid n'est plus qu'une sensation, pour lui. Comme un doigt qu'on passe sur une peau, un baiser au coin de la joie d'un enfant. Rien d'agréable ou de désagréable. C'est. C'est, et c'est déjà bien.

"Je t'ai fait attendre ?"

Noctis se retourne. Et ravale aussit?t sa frustration. Sur lui, deux yeux bleus sont posés. Deux globes parfaitement formés, accompagnés d'un sourire qu'il n'aura pas vu na?tre. Un corps entier. Pas de monstre de neige tourmenté par le vent, qui s'amasse et se déforme, se tord et s'étire. Pas de formes hasardeuses qui s'affinent lentement. Riku se présente à lui dans toute son élégance. Dommage. Il aime bien le voir se former.

Ce sera pour une autre année.

"On peut dire ?a.

- Désolé. Demyx a grignoté sur mon temps, cette année." le gar?on s'excuse.

"Il a eu du mal à laisser la place."

Plus que Demyx, c'est Axel qui leur a joué un fourbe tour. Le roi de la nuit plisse les yeux au souvenir irritant du grand dadais rouge. Il a chauffé plus que de raison leurs terres. Noctis n'est pas dupe. Il sait pourquoi l'esprit du soleil - ou du jour, selon les adorateurs - s'est amusé à retarder l'hiver. Il les a entendus, les tristes chants de Demyx, qui ont accompagné le début de Décembre et les dernières feuilles mortes. Mais les Règles sont les Règles. Ni les jours ni les saisons ne peuvent prolonger leur règne, même au nom de l'amour. Axel ne peut chasser sur son terrain sans craindre les représailles. Dépasser le solstice d'hiver de deux jours, si courts qu'ils aient étés, c'est une faute qu'il paiera en temps et en heures.

"J'ai raté quoi, cette année ?"

Caché sous un manteau épais, qui rappelle la fourrure blanche des renards qui l'accompagnent parfois, Riku s'approche. Ses cheveux ont poussé. Neuf mois d'hibernation, et les mèches dégringolent sous ses épaules. Un gris polaire, presque blanc. Si froid. Comme son regard. Comme le dos de sa main alors qu'il s'approche. Neuf mois, et il n'a pas grandi, sa tête d'éternel adolescend surmontant à peine l'épaule de son camarade. Neuf mois, et il n'a perdu ni cet éclat assuré au coin de l'?il, ni cette flamme dans le ventre, cette énergie qui s'écoule brusquement dans la terre. Noctis peut le sentir partout autour de lui, qui envahit tout ce qu'i conquérir.

L'hiver prend place. Il s'est fait attendre.

"Rien de particulier."

Des humains sont morts. D'autres sont nées.

"Ils ont changé de roi, au printemps." il précise.

"L'ancien est mort ?

- Evidemment.

- Empoisonnement ?

- Guerre. Contre un des pays à l'Est.

- Dommage pour lui."

Riku doit redresser la tête pour l'observer. Laisser voir son visage plus p?le encore que sa propre peau de lune. Cet épiderme presque translucide, comme une fine couche de neige où la glace de l'iris scintille. L'angle adouci de sa m?choire, qui se prolonge jusqu'à la pointe d'un menton marqué. Il lui semble - mais Noctis s'y trompe peut-être - que le minois de son attendu porte une trace infime du temps. A croire qu'il a vieilli.

Peut-être les adultes ont-ils attendu la neige avec plus d'impatience que les enfants, cette année.

Le gris se retourne et, d'un geste, fait du coton céleste un banc pour leurs jambes. Un tr?ne dénué d'artifice pour deux esprits perdus au début de l'hiver. Sur sa face, une onde lasse se glisse. Un reste de l'arrogance qui l'a un jour habité.

"Il y a encore des guerres, alors."

Riku l?che tandis qu'il se pose. Noctis ne le suit pas. Il préfère l'admirer. Retrouver la ligne simple de son regard, qu'il a nourrie des mois durant à l'aide d'une imagination sans cesse ravivée, après que le gar?on a fondu sous ses yeux à l'arrivée du printemps. Comme chaque année.

"Oui.

- Ils ne se lasseront jamais.

- C'est toi qui dit ?a ?"

L'esprit sombre se targue d'un sourire moqueur. La bouche de Riku se crispe.

Il peut bien jouer les grands sages épuisés, que le temps a assagis. Mais il y a mille, deux mille ans, il observait ces champs de bataille sanglants avec une avidité palpitante. Le sang qui giclait ne l'effrayait pas, il gorgeait son c?ur d'énergie. La vue des danses macabres l'émerveillait comme un enfant qui voit passer son roi. Il ne trouvait pas de beauté particulière dans la mort, ni dans les piles de cadavres qu'on amoncelait dans un coin avant d'y mettre le feu. L'odeur de chair br?lée ne l'excitait pas plus que ?a. Mais le chant de la victoire et l'exaltation d'une si grande compétition ne pouvait qu'enivrer son jeune c?ur avide d'affrontement. De défis. De gloire toujours plus grande. Plus lumineuse.

Fut un temps, Riku débordait d'un orgueil poisseux. Et Noctis l'aimait déjà.

"?a remonte.

- Et pourtant, ?a a été.

- Certes."

Maintenant, l'hiver s'est calmé. Il se fait moins rigoureux. Il épargne les familles les plus pauvres, incapable d'ammaser le bois qu'il leur faudrait pour passer la terrible saison. Il regarde sans pitié ni compassion les enfants morts qu'on tra?ne dans le caniveau, mais tire de l'eau ceux qui chutent dans le lac gelé. Surveille ces milliers de fourmis, s'assure qu'elles ne souffrent pas trop de sa présence pour les mois à venir.

Et il grimace face au sang que la guerre fait couler.

Quand est-ce qu'il a pris toute la mesure barbare de ces affrontements puérils ? Quand est-ce que le sort de ces autres, qu'ils observent de loin, a commencé à lui tirer des émotions qui écrasaient sa joie ? Noctis ne sait plus. Il y a quatre cents, cinq cents ans peut-être. Un jour, il s'est ramené sans son sourire. Sa peau blanche portait une paire de lèvres rude, rosée, fermée. Et dans l'?il, il avait cet effroyable éclat. La conscience d'un mal absurde. Un mal qu'il ne pouvait arrêter.

"Oh. Avant que j'oublie, Marluxia m'a demandé de te transmettre un message.

- Lequel ?

- Il trouve que l'hiver manque de fleurs."

Riku hausse un sourcil. L'esprit de la nuit voudrait bien lui expliquer toute la logique de l'idée, aux yeux de son comparse du printemps. Mais le gris ne sait même pas ce qu'est un printemps. Il n'en a qu'une vague idée, admirée sur de rudimentaires tapiceries.

"J'ai les perce-neige.

- C'est peu.

- Qu'est-ce que tu veux que je fasse avec des fleurs ?

- C'est à lui qu'il faut demander.

- Tu n'auras qu'à lui répondre ?a."

Il ne conna?t que la neigeblui. La neige qui le suit partout, les flocons qui dorment sur la terre gelée et les champs morts. La beauté, à ses yeux, réside dans un ciel d'étoile. Pour Noctis, elle habite chacun des points blancs qui tombent en légèreté, dessinent des pirouettes et caressent le dos de sa main, comme il fait avec celle du jeune homme - si tant est que les mots jeune et homme aient un sens pour eux.

Ont-ils suffisamment fait semblant de ne pas se tourner autour pour enfin se poser l'un contre l'autre ? Ou doit-il attendre encore un peu, avant d'aller chercher le souvenir de ses lèvres plus froides que la glace qui enrobe un lac d'hiver ?

"Je transmettrai."

Toute agréable que puisse être sa voix, comme un souffle qu'on murmure, un chant de vent qui glisse contre l'oreille, il s'en lasse. Noctis n'a jamais été très bavard. Il aime rester discret, caché dans l'ombre d'une fissure, sous le corps endormi d'un animal qui hiberne. Il aime observer, en secret. Fort d'une espièglerie que les années ont calmée sans l'effacer. D'une colère injuste qu'il a appris à ravaler, avec le temps. Les seuls mots qu'il aime adresser, ce sont ceux qu'il aiguise contre la verve provocante de Riku. Ceux qui leur font des éclats rieurs dans les yeux. Qu'ils ont appris à taire. ? partager en silence.

Sans bruit, il se pose près de lui sur ce banc austère. La place est froide. Un froid qu'il a impatiemment attendu, tiraillé par l'injustice des jours qu'Axel s'évertuait à prolonger, en dépit des Règles. Un froid qui remonte le long de ses os, jusque dans son ventre, caresse son cou et sa joue. Ou bien c'est la main de Riku qui se pose sur son visage. Leur p?leur qui contraste. La pointe de son index qui vient de glisser à la naissance de ses cheveux pour mieux s'y glisser. Lui demander, implicitement, de se tourner.

De se pencher, surtout. Puisque même assis, le dieu des neiges est encore trop petit pour espérer prendre son visage.


Voilà !

Je voulais essayer de revenir aux origines, avec un Riku plus proche de celui des premiers jeux, un brin arrogant. Je n'ai pas l'habitude de l'écrire comme ?a (de l'écrire tout court, en fait), j'espère que ?a rend bien !

Vos avis ?